Les fluctuations (2)

Quand on laisse les processus de deuil, de tristesse, de trahison progresser en soi, il y a toutes sortes de choses qui émergent et qui sont fascinantes, je trouve. J’aime bien l’introspection, ce pourquoi je n’aurais jamais été une « bonne femme » pour l’homme qui m’a dit un jour que l’intériorité ça ne l’intéressait pas du tout. C’est un peu drôle et triste en même temps. En dedans, il y a toi. C’est toi qui ne t’intéresse pas… et quand on ne s’intéresse pas à soi, d’une façon saine, au sens d’explorer qui on est, ce que l’on veut, ce qui nous anime et… on fait n’importe quoi aux autres. C’est pas mal ça qu’il m’avait fait, allant jusqu’à m’écrire la veille de ses fiançailles pour voir si je ne lui donnerais pas une nouvelle chance… Ce n’est donc pas juste à moi qu’il a fait n’importe quoi…

En repensant à Ali durant les derniers jours, il m’est revenu beaucoup de souvenirs, majoritairement glauques, des dix ans que j’ai passés à aller beaucoup trop souvent dans un bar près de chez moi. Il m’en est arrivé des choses épeurantes et plates là, c’est fou! Dont une histoire pénible avec un barman. Le vieux peintre aussi était caché là. Le dernier homme avec qui j’ai eu une relation sexuelle aussi et qui est venu se stationner devant chez moi de temps à autres jusqu’à deux ans après (c’est un peu beaucoup pour ça que ça m’a tant énervée cette histoire de stationnements devant chez moi cette année, qu’ils aient été intentionnels ou pas de la part de l’autre.) J’ai encore des malaises quand je repasse devant le bar. Je n’y suis plus entrée depuis plusieurs années maintenant.

Étrangement, ce qui m’a sortie des bars et de boire trop trop souvent, c’est le chien. C’est une race de chien effroyablement énergique même si je les adore de tout mon coeur. Ça fait partie des raisons pourquoi je les adore en fait… et des raisons qui font qu’ils énervent certaines personnes aussi… J’avais peur de l’échapper quand je buvais et comme je me savais responsable de lui, je détestais ça. Il y avait aussi ces hommes avec qui je rentrais parfois, parfois les mêmes un temps, parfois des différents et qui ne le traitaient pas toujours bien. Je me suis mise à me sentir comme une mère indigne qui expose son enfant à des crétins violents et je me suis fait penser à ma mère… Je n’ai pas aimé ça. Il m’a aidée à devenir plus responsable. Je ne m’aimais pas beaucoup à l’époque, mais il m’a aidée à apprendre à prendre soin de moi pour que je puisse bien prendre soin de lui. Et puis j’étais moins en quête d’amour. Il m’a aidée à sortir de la dépendance affective que je vivais avant. Eh oui… je l’ai été. C’est pour ça aussi que je sais que je ne veux pas de ça dans ma vie, surtout pas d’une personne qui n’est pas consciente d’être comme ça et qui n’est pas en démarche de changement. Ça fait des ravages épouvantables.

Même s’il m’arrive encore parfois d’y aller pour voir des amis, je suis vraiment heureuse d’être sortie du monde des bars. Je n’aime pas boire souvent et écouter des personnes saoules qui pensent qu’elles nous disent des choses intelligentes alors qu’elles nous disent des horreurs ne me manque pas du tout (même si on a vu que ça m’arrive parfois hors des bars aussi). C’est difficile pour moi d’être dans un état de conscience diminuée. Je pense que ça a à voir avec le fait que j’ai dû traverser des phases de stress post-traumatique et de dépression assez profondes. J’ai été souvent et longtemps catapultée hors de moi par les violences que j’ai vécues. Quand on a été hors d’état si longtemps à cause des actions des autres, l’être par ses propres actions devient pénible. Ça me nuit aussi. J’en ai parlé récemment. Quand j’étais ado, j’ai arrêté de prendre de la drogue pour ça: parce que j’avais l’impression de plus en plus forte que je ne reviendrais pas à la surface, que je ne me retrouverais plus jamais. J’ai plusieurs ami.e.s qui en sont morts aussi. Ça a réglé la question assez vite pour moi. Je n’ai pas réglé assez vite celle des autres qui consomment autour de moi et leur fuite, leur évitement d’eux-mêmes m’a beaucoup fait souffrir dans la vie.

J’ai pensé à tout ça hier et aujourd’hui. Je me suis rappelée de choses que j’ai faites et qu’on m’a faites. J’ai quand même passé deux belles journées. J’ai aussi rêvé un peu à l’avenir, chose que je dois faire de plus en plus si je veux me mobiliser pour concrétiser mes rêves. J’ai aussi trouvé une petite maison magnifique dans les cantons. Je magasine parfois des maisons quand j’ai besoin d’imaginer d’autres vies. Je n’ai pas encore les sous, mais mon émerveillement me dit que d’autres chemins m’attendent et qu’ils seront peut-être magnifiques.

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