Oh, where’s Mama? She’s taking a little nap in the trunk
Oh, that smell? Dada must’ve runned over a skunk
Now, I know what you’re thinking
It’s kind of late to go swimmin’
But you know your Mama, she’s one of those type of women that do crazy things
And if she don’t get her way, she’ll throw a fit
…
But for now, we’ll just say Mama was real, real bad
Was being mean to Dad and made him real, real mad
But I still feel sad that I put her on timeout
…
Wake up, sweepyhead, we’re here, before we pway
We’re gonna take Mama for a wittle walk along the pier
Baby, don’t cry, honey, don’t get the wrong idea
Mama’s too sweepy to hear you screaming in her ear
That’s why you can’t get her to wake, but don’t worry
Dada made a nice bed for Mommy at the bottom of the lake
97 Bonnie and Clyde – Eminem
(La version de Tori Amos réussit à être plus terrorisante :
Cette chanson s’est mise à jouer ce matin dans mes écouteurs alors que je me rendais au travail pour parler de masculinité toxique en classe. Je ne sais pas quelle réception elle avait eu, à l’époque, quand Eminem l’a sortie pour la première fois. Quand je regarde les commentaires sur YouTube, les gens disent qu’il « était bizarre dans ce temps-là », la chanson ayant été écrite en parallèle avec un moment dans la vie du chanteur où sa femme l’empêchait réellement de voir sa fille lors de leur séparation. Marilyn Manson aurait apparemment refusé d’y contribuer parce qu’elle était trop misogyne pour lui… chose qui sonne bien drôle aujourd’hui…
Eminem a écrit plus tard une autre chanson, Kim, qui se passe juste avant celle citée, au moment où il la tue. Cette chanson est également terrorisante. Je ne sais pas comment ces chansons seraient reçues aujourd’hui. Elles ont quelque chose d’à la fois génial et terrible, mais j’ai l’impression qu’on l’accuserait d’incitation à la violence envers les femmes assez rapidement. Je ne sais pas quelle était son intention à l’origine. Personne ne saura jamais puisque personne n’est dans sa tête et qu’il peut raconter ce qu’il veut, mais ça m’arrive encore de me demander, plusieurs années après les avoir entendues pour la première fois, comment il se sentait et ce qu’il voulait atteindre en écrivant ces chansons. La plupart des gens ont dit que s’ils avaient été cette femme, qui s’appelle réellement Kim, ils se seraient sauvés en courant. On peut comprendre j’imagine…
Mais c’est peut-être justement l’existence de ces deux chansons qui fait qu’elle est encore là et lui aussi. Je ne les ai jamais perçues personnellement comme des appels à la violence. Plutôt comme la canalisation d’une violence qui risquait alors de le dépasser. Bien peu de gens pourraient vivre avec cette partie de soi exposée au monde. Je ne suis pas très fan d’Eminem et je ne le connais pas si bien, même si j’ai vu le film sur sa vie dont un de mes exs m’avait sorti une partie du monologue (adressé à Kim, justement) pour mettre fin à notre relation. J’étais restée muette de stupéfaction. Il reste que j’ai une sorte de respect pour l’existence de ces deux chansons, particulièrement celle adressée à l’enfant. Elle me rappelle des souvenirs. Elle me dit que je n’ai rien halluciné de ce qui m’est arrivé.
Bien sûr il s’agit d’un mélange de hasard et des choses que j’analyse en général dans ma vie personnelle et professionnelle si cette chanson est revenue à moi ce matin après ce que j’ai écrit hier et ce à quoi j’ai pensé durant les dernières semaines. Je ne suis pas une personne qui a des « daddy issues ». Mes problèmes avec mon père sont réglés depuis bien longtemps. J’ai dû le sortir de ma vie. J’ai dû analyser en long et en large les choses qu’il a faites, dites, les structures de son comportement et de sa personnalité et… Il n’est pas un monstre, malgré tout ce que j’ai pu en dire et en écrire. Je ne lui pardonne quand même rien et je ne suis pas en contact avec lui. C’est trop malsain, voire dangereux pour moi. Il est comme une sorte de poulpe menaçant dont les tentacules s’enfoncent là où vous ne les attendez jamais. Il est comme ça à cause de ce qu’il a vécu, de ce qu’on lui a appris, mais surtout parce qu’il n’a jamais questionné la vision du monde qu’on lui a transmise ni son comportement. J’ai vu une image sur Instagram l’autre jour qui disait que curieusement, les gens aiment dire que les femmes ont des « daddy issues », mais qu’on ne se pose jamais de questions sur la personne qui leur a transmis ces problèmes, sur quel type d’homme ça a pu être et ce qu’il a pu faire. C’est toujours la même histoire de déresponsabilisation masculine.
Aujourd’hui, je vais bien, malgré les effets secondaires des violences qui persisteront toujours dans ma vie. C’est facile de me dire de ne pas y penser, de penser seulement aux belles chose et… mais vivre le type de violences que j’ai vécues, ça laisse des traces dans le cerveau, qu’on le veuille ou pas. Dans le système nerveux aussi et le fait de les nier nuit plus qu’il aide. Pendant des années, on a continué à me mettre le fait que je vivais des relations violentes sur le dos, me disant que c’était parce que je ne m’aimais pas, parce que je choisissais de mauvais hommes et… Le fait d’avoir une mauvaise estime de soi ne signifie absolument jamais que c’est votre faute si on vous maltraite. La violence appartient toujours à la personne qui la commet. Pas à celle qui la reçoit. Voir les images de Nedra :



J’ai été très profondément blessée par les 2.5 dernières histoires qui me sont arrivées avec des hommes. Je me réveille encore parfois la nuit avec une douleur au cœur qui me donne l’impression de faire une crise cardiaque en même temps que d’avoir reçu un coup de poing dans le ventre provenant de nulle pas. Ça s’estompera, je sais. Cependant, j’ai l’impression que la cheerleader des hommes blessés que j’avais en moi est pas mal raide morte. Ils l’ont éventrée, sans aucune raison valable, après lui avoir bien sûr signifié que ce qui lui arrivait était sa faute. Je ne pense pas pouvoir la ressusciter vraiment. Le mieux que je peux faire, je pense, c’est de leur souhaiter malgré tout de régler leurs problèmes et d’aller mieux… et de souhaiter intérieurement qu’ils ne traitent plus jamais personne comme ils m’ont traitée. Je trouve tout de même toujours ironique que ces hommes se soient permis de me donner des conseils relationnels… Je trouve aussi ironique qu’entre moi et l’homme, ce soit toujours lui qui ait le plus de problèmes alors qu’il assume toujours que ce sera moi, à cause des choses que j’ai vécues… mais je les ai réglés, moi, mes problèmes… Pas toi.
Je continue bientôt…
