Les limites (2)

            Ayant grandi sans avoir de limites personnelles claires, j’ai eu un peu plus de recul critique quand j’ai appris l’existence du concept et que j’ai commencé à l’intérioriser. Il y a quelque chose d’utile, dans cette idée, mais il y a aussi quelque chose qui peut devenir assez vite malsain malheureusement, lorsqu’elle est utilisée contre nous. Ces deux personnes dont je parlais dans le dernier billet, ces personnes qui m’ont dit que mon problème était que mes limites n’étaient pas claires, elles me disaient cela en fait pour justifier à leurs yeux le fait qu’elles me traitaient mal… Parce que parfois ça devient ça dans la bouche des personnes plus ou moins mal intentionnées. Elles essaient de nous faire croire qu’elles nous ont fait ce qu’elles nous ont fait parce que nous ne leur avons pas imposé des limites claires. Il me semblerait plus juste que chaque personne interroge son comportement et se demande si ses façons d’agir sont réellement saines pour les autres ou pas. 

            Il me semble effectivement utile d’imposer une limite à des personnes moins présentes dans ma vie, par exemple un collègue ou une connaissance qui me ferait de temps à autre quelque chose de déplacé. Il me semble anormal de devoir le faire constamment avec des personnes qui prétendent être mes amies… Je ne veux pas de ce genre de lien en tout cas. Vu la fréquence où certaines personnes me rabaissent et me disent des choses négatives, tout en prétendant avoir un lien d’amitié avec moi, il faudrait que je leur rappelle mes limites au moins une ou deux fois par semaine (voire plus). Alors parfois je laisse passer en faisant le vœu un peu naïf qu’elles finissent par comprendre que leur comportement n’a pas de bon sens… mais bien sûr ça n’arrive pas. Souvent, les personnes qui rabaissent constamment les autres sont des personnes qui n’ont pas été assez valorisées quand elles étaient enfant. Les personnes qui se mettent toujours en compétition avec les autres aussi. Ce sont des personnes qui n’ont pas adressé ce problème ni son effet sur les autres et qui pensent que c’est normal d’agir ainsi alors que ça ne l’est pas vraiment. C’est plutôt épuisant pour l’entourage. 

            J’ai été un peu comme ça quand j’étais plus jeune. Je devais toujours être la meilleure dans tout. J’avais un problème de perfectionnisme. Avec le temps, en thérapie, nous avons exploré cet aspect de moi et j’ai fini par comprendre que les critères que je portais afin de juger de moi et de ma valeur n’étaient pas les miens et qu’ils étaient pas mal insensés dans l’intensité de leurs exigences. J’ai appris à identifier qui je voulais être, quels critères je voulais utiliser pour juger de ma vie et de mes accomplissements et… Maintenant, je ne me compare à peu près plus jamais avec personne et mon seul point de comparaison est moi-même, les progrès que j’ai faits par rapport à qui j’étais avant. Je ne me place plus jamais en compétition avec les autres non plus. J’ai appris que ma valeur comme personne ne dépend jamais de comment je performe à un point x dans le temps et dans telles circonstances. Il y a toujours trop de facteurs qui entrent en ligne de compte. Je sais par exemple que cette semaine je risque de ne pas avoir une note si élevée dans mon examen parce que j’ai eu la Covid, des allergies épouvantables et que j’ai adopté un chiot durant les dernières semaines. J’ai donc un peu moins étudié que je l’aurais fait normalement. C’est donc normal que je ne sois pas au top de mes capacités. C’est ok et je n’ai pas à me juger durement pour cela. C’est la deuxième fois que je fais un parcours universitaire. Je me suis déjà prouvé que je pouvais le faire parfaitement avec une moyenne à la maitrise et au doctorat de 4.3 (sur 4.3, oui)… C’était insensé et excessif de me demander ça à moi-même la première fois, mais je l’ai fait. Je conclus que maintenant, je n’ai plus rien à me prouver sur le plan académique. Je fais les études que je fais maintenant par plaisir et parce qu’elles me donnent accès à des ateliers super bien équipés et me font rencontrer des gens intéressants. Ce que les autres penseront de ma performance n’est pas pertinent. Ils ne connaissent pas le contexte et n’ont pas les mêmes critères que moi. 

            J’imagine qu’on peut dire que ma nouvelle limite c’est de ne plus tolérer les personnes qui sont trop négatives, qui se placent en compétition avec moi ou qui me rabaissent à répétition. Ce ne sont pas des personnes saines pour moi. Peut-être qu’elles dérangent moins d’autres personnes ayant un vécu différent, mais pour moi elles sont trop blessantes et lourdes à fréquenter. Je ne veux pas non plus être trop proche des personnes qui ont une vision irréaliste de ma vie. Les personnes qui sont incapables de faire des liens entre ce que je leur dis que j’ai vécu et mon attitude. C’est par exemple complètement absurde d’essayer de me faire croire que ma peur quand je commence à fréquenter quelqu’un est un signe de négativité ou de pessimisme. Ce serait le cas si je n’avais eu qu’un ou deux mauvaises expériences. J’ai arrêté de compter mes mauvaises expériences avec les hommes à l’âge de 35 ans. J’étais rendue à 60, de différentes natures et de différents niveaux de gravité. Ça fait 6 ans de ça maintenant et j’en ai eu d’autres depuis. Le fait que je sois encore capable de faire preuve d’enthousiasme face à un nouvel homme après tout ça tient pratiquement du miracle et il ne suffit pas, non, de me dire que celui-là sera différent et me traitera avec plus de respect. Pourtant, je me le dis à chaque fois et j’arrive toujours à rassembler le courage nécessaire afin d’être ouverte d’esprit, ouverte à la rencontre et à traiter l’autre avec respect… ce qui ne m’est jamais rendu. Je pense qu’arrivée à ce stade, c’est normal que j’aie peur. C’est aussi normal que je n’aie plus envie. Ce n’est pas un signe de faiblesse ni de négativité. C’est un signe de santé mentale et de respect de moi-même que de reconnaître que je ne suis plus capable de subir le manque de respect des autres et que je n’ai plus envie de devoir me réparer à chaque fois. Je ne suis pas une personne qui se fiche des autres ni qui prend les relations à la légère. Je ne le serai jamais. Je sais trop les conséquences que ça a sur les autres de subir cette mentalité de merde où on leur fait n’importe quoi sous prétexte de légèreté qui se révèle en fait la plupart du temps être juste un signe d’immaturité psychologique et relationnelle. 

            Une autre limite que j’ai est de ne plus tolérer les personnes qui prennent mon état de stress post-traumatique complexe chronique à la légère. Ça n’a rien de léger comme condition. Ce n’est pas non plus quelque chose que je peux décider de ne plus avoir ni quelque chose qu’il est possible de faire disparaître en me disant à moi-même que je vais bien et que ça ne m’affecte pas vraiment. Ce sont des conneries entièrement fausses quand vous me dites ça. Ma vie et mon état sont déjà assez complexes comme ça, je n’ai pas en plus besoin de me taper des commentaires mesquins de personnes qui ont des croyances erronées et me disent que je suis négative parce que je ne rêve pas au prince charmant et ne partage pas leurs idées fausses sur mon état de santé dont elles ne savent en fait absolument rien. C’est vraiment dur à vivre, l’ignorance…

            Si la petite demoiselle sur la photo est capable de comprendre en un seul jour, à l’âge de 9 semaines, que ma limite pour elle est qu’elle attende que je l’aide à monter les escaliers parce qu’elle est trop petite et que ce serait mauvais pour ses articulations et attende sagement que je le fasse, je pense que bien des humains pourraient réfléchir un peu plus et s’apercevoir ou du moins avoir un minuscule doute qu’il est possible, seulement possible, que leur comportement puisse être malsain ou blessant pour les autres. Je ne pense pas qu’on devrait avoir à surveiller et remettre à leur place nos amis tout le temps… ni même les étrangers (mais ça je sais que c’est trop d’idéalisme de ma part)… Alors prenez vos responsabilités et analysez vos comportements et vos intentions au lieu de blâmer le manque de limites des autres pour les conneries aberrantes et stupides que vous leur faites subir.   

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