C’est l’heure des petites blagues désagréables… Quand on me donne des conseils déplacés sur comment gérer mon stress post-traumatique complexe chronique, parfois ça me donne envie de répondre par l’absurde, par exemple que maintenant qu’on m’a éclairée sur ce que je vis sans me poser aucune question ni savoir réellement de quoi on parle, je vais me dépêcher d’écrire des lettres à Gabor Maté et Bessel Van der Kolk, ou à toute autre personne ayant dédié sa vie à l’effet des violences sur le cerveau, afin de les informer qu’il ne sert plus à rien de continuer leurs recherches puisque le problème sur lequel ils se penchent (et sur lequel d’autres personnes se penchent depuis plusieurs décennies) a enfin été résolu. Ça donnerait quelque chose comme ça :
Chères personnes ayant consacré l’entièreté de votre vie adulte à faire de la recherche sur les traumatismes et à traiter des personnes en ayant vécu,
Sachez que vous avez perdu votre temps et que votre travail est désormais inutile. Il l’a en fait toujours été. Le problème du stress post-traumatique a en fait été résolu par Monsieur et Madame tout le monde de Montréal, n’ayant aucun diplôme en médecine, ni en psychiatrie, ni en psychologie, ni dans aucun domaine lié à la santé mentale. Figurez-vous que tout ce temps, le remède à tous les traumatismes vécus consistait dans le fait de se dire à soi-même que son passé n’a pas d’importance et qu’il ne joue aucun rôle dans la personne que nous sommes, dans le fait de penser à autre chose et dans le fait de consommer nourriture, drogues et alcool afin d’éviter de vivre quelque inconfort que ce soit. Vous pouvez donc jeter toutes vos recherches et les résultats de vos études à la poubelle dès maintenant et aller faire la queue au bureau d’emplois ou à l’aide sociale puisque nous n’avons plus besoin de vous ni de ce que vous avez apporté à l’humanité. C’est de la marde. J’espère que vous le comprenez.
Gabor… Je sais bien que tu as passé des années à élaborer un traitement utilisant des drogues, particulièrement la psilocybine, pour soigner les patients souffrant d’effets de traumatismes. C’était complètement inutile. Au fond, tout ce que ça prend, c’est fumer du hash ou prendre de la coke, achetés à des dealers locaux et dont il est impossible de déterminer le degré de pureté ni les autres cochonneries présentes dedans, en te saoulant dans ta cuisine et en disant des horreurs à tes amies en ligne afin d’aller mieux. Tes études sur les toxicomanes et les liens entre les violences vécues et la toxicomanie peuvent aller aux chiottes aussi puisqu’en fait être polytoxicomane est maintenant un état qui semble préférable pour plusieurs personnes au fait de régler ses problèmes et difficultés d’autres façons, par exemple la thérapie.
Bessel, je sais bien que tu as passé des années à étudier comment les violences se répercutent dans le corps et causent toutes sortes de troubles de santé. Les traitements que tu as développés sont cependant complètement inutiles. Ce qu’il faut en fait faire c’est s’enfermer chez soi et boire du café et fumer des cigarettes en bougeant le moins possible. C’est ce qu’il faut pour avoir une vie épanouie après avoir vécu des violences graves. Rentre dans ton trou maintenant. Nous n’avons plus besoin de tes services.
Et…
On voit que ça donne un résultat assez joyeux et tout à fait logique. Un résultat très utile aussi. Bien sûr, au cas où certaines personnes n’auraient pas compris, je ne crois à rien de ce que je viens d’écrire. Je comprends qu’il est plus facile pour la plupart des personnes de se mentir à elles-mêmes que de vraiment questionner ce qu’elles ont vécu et de vivre les émotions qui y sont liées. Je comprends aussi que beaucoup de personnes ont des identités fragiles et que de les forcer à accepter réellement ce qui leur est arrivé risque éventuellement de causer une désorganisation chez elles. Mais, comme je disais, je n’en ai plus de patience pour les personnes qui pensent qu’elles savent mieux que tous les experts en santé mentale qui étudient les traumatismes ce qui est bon pour moi.
C’est rare que je me permets de dire des vacheries aux autres. Je suis capable, comme tout le monde, d’adopter une posture condescendante face à la vie des autres. C’est pourtant quelque chose que je me refuse à faire la plupart du temps même si je pourrais généralement me le permettre puisque j’ai souvent plus de connaissances sur les sujets abordés que les personnes qui se permettent de me traiter avec condescendance. Je juge souvent plutôt que c’est inutile, mais à un moment donné, à force de répéter, je n’en peux plus. Je ne reçois pas de salaire et je n’ai pas la fonction sociale d’éduquer toutes les personnes ayant des croyances étant l’équivalent des idées créationnistes sur le plan des traumatismes vécus par les humains. Mon temps est précieux.
Je suggérerais aux personnes qui se permettent de dire que les autres sont laids ou qu’ils vivent dans la peur ou qu’ils devraient se geler la face plutôt que de régler leurs problèmes de se regarder dans le miroir et de faire un sérieux examen de leur vie, de leurs valeurs et des moyens malsains qu’elles utilisent afin d’essayer de faire tenir leur estime de soi extrêmement fragile. Votre besoin de vous placer constamment en compétition avec les autres afin de vous sentir supérieurs ne fait que montrer votre faiblesse et votre fragilité réelles. Les personnes qui sont heureuses et qui vont bien, qui ont une bonne estime d’elles-mêmes, n’ont pas besoin de descendre les autres et qui ou ce qui leur plaît au quotidien.
Je choisis l’amour et je choisis ma vie qui en est une de respect, de curiosité, d’amour, de remises en question, de dépassement de soi. Elle est, pour moi et mes besoins, plus enrichissantes que les autres avenues possibles. Je serai à l’avenir plus prudente face à qui je laisse entrer dans ma vie. Je ne pense plus qu’il reste de personnes se permettant de me dire des choses blessantes dans mon entourage. Je choisis aussi de refuser l’hypocrisie entourant la santé mentale. La plupart des gens disent sans arrêt que c’est important d’en parler et de s’informer. Dans les faits, quand vous leur parlez de ce que vous vivez, ils n’ont souvent aucune envie d’en tenir compte ni même de comprendre ce que vous vivez. Ils exigeront cependant de vous que vous les acceptiez comme ils sont, même s’ils ne font pas l’effort réciproque. À partir de maintenant si jamais vos bonnes intentions s’incarnent en comportements nuisibles et violents, je vous recommande de vous les mettre dans le cul, vos bonnes intentions. Ne pas respecter les limites et la réalité d’une personne n’est pas avoir de bonnes intentions. Je suis certaine que cette femme avec qui j’ai eu un conflit oubliera pratiquement que quand j’ai fini par abandonner, ça faisait déjà 5 fois cette semaine-là que je lui disais que ce qu’elle me disait de moi ne correspondait pas à qui j’étais ni à ce que je voulais. À un moment donné, il faudrait entendre l’autre.
Je serai plus positive et constructive dans les prochains billets. Je n’ai pas oublié celui constituant la suite de ma réflexion sur le rapport à la solitude de Dahmer. J’attends seulement d’avoir retrouvé ma santé parce que c’est un sujet délicat qui demande beaucoup de nuances et j’ai besoin d’y être entièrement présente.
Bonne journée!
