La maison

            Bien sûr, je savais bien, même au moment où cela se passait, que je ne serais pas aspirée de force dans les États-Unis même si je passais près de la frontière. Mais quand même… Cette histoire de retrait du droit à l’avortement, ça a été comme la concrétisation de cette impression que j’ai souvent que nous vivons une sorte de continuel reboot qui nous ramène à la mentalité des années 50 et ça m’a fait peur, comme à toutes les femmes, j’imagine, sauf celles partageant le délire qui a causé le vote de ces hommes. Parce que je ne suis pas capable de l’appeler autrement qu’un délire… Il y a quelque chose que je ne peux pas respecter dans les idées arriérées… Il s’agit de leur violence, bien sûr…

            Je pense que cette terreur que j’ai ressentie témoigne d’une sorte de naïveté et d’idéalisme face au genre humain que je porte encore à quelque part en moi. Je ne sais pas si c’est de la naïveté ou de l’espoir. Même si je sais que les choses affreuses existent encore, ça m’arrive régulièrement de tomber en bas de ma chaise mentalement et d’avoir une sincère surprise que, par exemple, le racisme et le sexisme existent encore avec une telle fréquence dans nos vie… Malgré tout le temps que je passe à lire sur différentes formes de violences, à écrire sur elles, enseigner contre elles et… Il y a quelque chose en moi qui est à chaque fois sincèrement surpris quand je les rencontre dans la vie. C’est bon signe, je crois, en partie, même si cela me fait fréquemment vivre de la tristesse. Ça veut dire que je ne vis pas tant dans la peur et l’amertume. Ça veut dire que je n’ai pas encore atteint le cynisme total, même si je connais bien les horreurs dont les humains sont capables. 

            Ce matin, je rentre à la maison et j’ai hâte. Parfois, il me semble que je vais seulement en vacances pour voir des belles choses et me souvenir, surtout me souvenir, à quel point j’aime ma vie et que je suis incroyablement chanceuse de vivre où je vis, d’avoir l’emploi et l’horaire que j’ai et… La plupart des gens détestent leur routine. J’ai la chance de toujours ou presque pouvoir m’en donner une que j’aime et de pouvoir en modifier une bonne partie si les choses ne me conviennent pas. Je réalise à quel point c’est rare de pouvoir vivre comme ça, oui. Je ne dois jamais l’oublier. Je suis aussi extrêmement chanceuse d’avoir autant de passions et d’intérêts. Ça me donne une vie riche et heureuse la plupart du temps, même si ici je parle souvent surtout des choses pénibles qui m’arrivent. J’ai quand même une très belle vie. 

            J’ai réalisé durant ce voyage que je ne suis clairement pas une voyageuse d’été… J’ai pensé, en février quand j’ai fait ma réservation ici, que ce serait bien d’essayer un peu de faire comme les autres et de partir l’été, pour une fois que je le pouvais… mais ce n’était pas une si bonne idée, même si les jours que j’ai passés ici m’ont fait voir plein de beauté que je garderai en moi pour longtemps. Le fait est que je déteste l’été à cause de la chaleur… et quand on est en voyage (en tout cas quand on voyage comme je le fais) on ne peut pas toujours accéder à ce qu’on voudrait immédiatement et être prise au beau milieu de nulle part à crever de chaleur, ça n’a absolument rien d’enthousiasmant pour moi… même si c’est joli autour, oui.

            J’ai passé les derniers jours à m’inquiéter pour mes fleurs et mon jardin et à avoir envie d’avancer dans mes projets plus qu’avoir envie de me promener dans la campagne, même si je l’ai fait, oui, et que je constate quand même l’apaisement que cela m’a procuré. Cassius n’était pas non plus tellement en état de voyager et je pense que ça a été un peu difficile pour lui. Il sera heureux de retrouver son lit et les bruits familiers. En voulant me protéger, mon brave toutou s’expose quand même à beaucoup de stress… Il surveille partout, tout le temps, grogne, jappe… s’inquiète pour sa maîtresse qui essaie de le rassurer, mais il est bien jeune et inexpérimenté, le pauvre. Il sera heureux de revoir ses amis aussi. 

            Donc tantôt je rentre. La panne cellulaire m’a empêchée de faire plusieurs choses, mais j’ai quand même appris et je suis somme toute contente de mon séjour. J’ai vu de belles choses, mangé des mets délicieux, pris des photos intéressantes et je me suis reposée de la ville et des contacts sociaux forcés. J’ai bu de bonnes bières surtout. Je suis prête à redémarrer mon quotidien qui sera surtout sous le signe de la santé. C’est ce dont je dois m’occuper de la façon la plus urgente pour les mois à venir. 

            Je m’ennuie de mon lit, de mes voisins, de mes amis, de mon jardin, des petits parcs de mon quartier, de mes livres et du matériel nécessaire pour réaliser mes projets. Je m’ennuie même de la Banq… En route! 

            À plus! 

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