Attention : Le texte suivant traite de sujets qui pourraient être difficiles pour plusieurs personnes.
Pour une enfant, grandir avec des gens instables qui changent toujours de comportement, c’est incroyablement inquiétant. C’est inquiétant parce que l’enfant ne peut pas survivre seule. Être face à des personnes sur qui on ne peut pas compter est terrorisant dans ce cadre et provoque une terreur et un effroi indicibles parce que c’est notre vie qui est en jeu. C’est cela qui se rejoue en moi à chaque fois que je suis face à une personne qui passe d’un extrême à l’autre dans la relation et dont l’instabilité me fait vivre un choc terrible qui me renvoie à ces émotions qui sont présentes contre mon gré dans ma mémoire et dans les structures de mon cerveau, mais aussi dans mon corps. Je ne suis par contre plus impuissante par rapport à ces émotions maintenant que j’en ai pris conscience. Je vais expliquer un peu, mais je ne vais pas donner trop de détails parce que je suis en train d’écrire deux romans qui sont en lien avec ce que j’ai vécu dans ma famille et je veux quand même conserver une partie des idées pour cela.
Quand j’étais très jeune, ma mère était « plus gentille », je dirais… mais elle manquait tellement de confiance en elle qu’elle n’était pas vraiment rassurante finalement et donc n’aidait pas beaucoup à nous réconforter et nous faire sentir en sécurité. Cela venait de ce manque de confiance et d’un grand sentiment d’incompétence qui l’habitait. Elle avait aussi des idées très vieillottes au sujet de ce qu’est et de ce que doit être une femme. Ça m’a nuit quand même considérablement pendant longtemps dans ma vie. Je suis consciente, oui, qu’elle aussi a été une victime d’une personne (ou plutôt de plusieurs personnes, mais je parle seulement d’une ici) violente. Je le précise parce que parfois les gens me prennent pour une conne et font des caricatures ou déforment ce que je dis… « Ta mère aussi est une victime. Tu ne devrais pas la critiquer. Tu devrais avoir pitié d’elle. ». Je réponds à cela que vous ne savez pas de quoi vous parlez et que vous cherchez à vous rassurer vous parce que vous ne voulez pas qu’on vous tienne responsables de ce que vous faites.
Ma mère a été violentée, oui. Elle a quand même fait le choix de rester avec cet homme et de le faire passer avant la santé mentale de ses enfants, en nous disant par exemple qu’il fallait être plus raisonnable que lui parce que c’était lui l’enfant… Est-ce que vous avez une idée de ce que ça fait au développement d’une enfant de 5 ans de se faire dire qu’elle doit être plus raisonnable et prendre soin d’un homme de 32 ans dont le rôle devrait être de la protéger et de s’occuper d’elle et qui la terrorise à la place? Vous savez ce que ça demande de courage et de sacrifice? Est-ce que vous vous demandez encore pourquoi je n’en veux pas, d’enfant? La réponse est parce que j’ai eu un enfant de cinq and d’âge mental, mais de 27 ans plus âgé que moi dans les faits toute ma vie et que je n’ai pas eu de vie à cause de lui pendant environ 30 de mes 40 ans… et que j’ai passé les dix dernières années de ma vie à m’en remettre… Et parce que j’ai peur des effets que les violences vécues ont eu sur ma vie et que je ne veux pas risquer d’imposer ces effets secondaires à un enfant qui ne pourrait pas facilement s’en tirer. Un chien ça va. J’arrive à bien m’en occuper… mais un enfant aurait d’autres besoins auxquels j’ai peur de ne pas toujours être en mesure de répondre par exemple si jamais je revivais encore une crise de stress post-traumatique aigue comme celle que j’ai vécue durant les dernières semaines. Ça aurait gravement affecté un enfant.
D’un point de vue existentiel, il y a aussi un très fort besoin pour moi d’avoir enfin ma vie. Une vie où je ne suis pas placée en position d’être complètement responsable de quelqu’un et de devoir disparaître pour lui ou elle… de devoir m’effacer et mourir intérieurement comme j’ai dû le faire pour presque toutes les relations que j’ai eues dans ma vie. C’est en bonne partie pour ça que j’ai tellement besoin de me montrer, de parler de moi et de prendre plus d’espace maintenant. Parce qu’on a essayé de me faire croire que je n’avais aucune importance et que je devais disparaître en étant au service des autres… Ma mère est une victime de violence conjugale, oui, mais en restant, elle a aussi choisi de devenir comme lui avec le temps et d’être elle-même violente et ça non, ce n’est pas possible pour moi de l’excuser et de le pardonner. Si tu dis à tes enfants qu’ils sont difficiles à aimer ou qu’ils doivent se suicider, tu n’es plus une victime. Tu es devenu un agresseur. Peu importe ce qui t’es arrivé avant, ça n’excuse pas le fait de maltraiter les autres aujourd’hui.
Je déteste cette excuse de la personne qui a été victime avant. J’ai vécu des violences et je suis allée chercher de l’aide. Je ne me suis pas mise à faire n’importe quoi aux autres. J’ai accepté ma responsabilité. Celle de mettre fin à ce cycle de violences et de faire le travail nécessaire sur moi pour m’en sortir. Je reparlerai de cette nécessité et cette responsabilité du travail sur soi suite à un trauma bientôt, parce que j’ai l’impression qu’elle n’est pas claire et cause beaucoup de problèmes et d’erreurs sur les plans personnel et social… Par exemple dans la nouvelle exigence de douceur qui devient elle-même une violence et finit par nuire à la santé mentale de tout le monde… mais j’y reviendrai.
Je n’aime pas non plus l’excuse de l’inconscience… « Tes parents ne sont pas conscients de ce qu’ils font! ». Je leur ai dit, pourtant, et ils ont refusé d’en prendre conscience et d’aller chercher de l’aide. Peut-être que cet homme que j’ai fréquenté au printemps était lui aussi, pas vraiment conscient de ce qu’il fait. Le problème avec ce type d’excuse, c’est que l’inconscience de la personne qui maltraite l’autre ne rend pas ça moins grave. Ça a exactement les mêmes conséquences sur la personne qui reçoit la violence et les mauvais traitements. L’intention de la personne et son état d’esprit ne changent rien. Absolument rien. J’ai eu une conversation sur ce sujet avec une amie hier. Elle me disait qu’enfant, si elle était en désaccord, elle se faisait dire qu’elle était difficile. Elle n’avait pas le droit de penser autrement que sa famille. Et elle me disait qu’elle n’avait pas vécu de sévices. C’est l’idée répandue… que pour que ce soit de la violence et pour que ça nuise, il faut que la personne qui nous fait cela veuille mal faire. C’est faux. Si une personne ne vous donne pas le droit d’avoir des émotions, de penser différemment, d’être différente et… Elle est en train de faire quelque chose qui vous nuit, peu importe ses intentions et peu importe si elle en est consciente ou pas. Ça ne fait pas d’elle un monstre, mais c’est indubitablement une forme de violence.
C’est comme ma mère qui essaie de me faire croire qu’elle est une bonne personne tout à fait gentille et que c’est normal de sa part de me dire que je devrais me suicider… Et elle explique ça super calmement en prenant un air idiot de femme qui ne sait pas ce qu’elle fait. Peut-être qu’elle ne sait effectivement pas ce qu’elle fait. Peut-être qu’elle se ment si fort que ça la rend inconsciente de ce qu’elle fait. Ça n’excuse rien. C’est notre responsabilité à chacune et chacun de se remettre en question si une personne nous dit que notre comportement lui fait du mal. Parfois ce sera vrai et il faudra vraiment changer et parfois ce sera faux et ce sera la personne qui se cherche une excuse pour ne pas changer et nous dénigre à la place… mais il faut au moins se poser la question pour vérifier, accepter d’être imparfait et changer si nécessaire…
On dirait que plusieurs personnes s’imaginent que leurs mécanismes de défenses sont ok juste parce qu’ils les ont choisis et que personne n’a le droit de s’en plaindre, peu importe les effets que ça a sur leur vie. On dirait aussi que plusieurs personnes ne veulent prendre aucune responsabilité dans les situations qu’elles provoquent en fait elles-mêmes. Comme cet homme qui fuit, que j’ai fréquenté. J’essayais de lui pointer que son comportement n’allait pas avec ce qu’il disait en parlant du fait qu’il avait eu les comportements d’une personne super intéressée pendant plusieurs semaines. Je pense que j’ai utilisé la formulation « Tu m’as couru après… ». Il a senti la nécessité de me dire qu’il n’était pas d’accord avec mon interprétation et que nous avions tous les deux participé. Oui, j’ai effectivement participé, mais seulement sur la base que je pensais que j’avais en face de moi une personne honnête qui voulait vraiment que la relation fonctionne et non quelqu’un qui s’amusait à tester s’il allait avoir mon intérêt parce qu’il pensait que c’était impossible que je m’intéresse à lui et qui n’avait aucunement l’intention de faire des efforts pour que ça fonctionne et qui fuirait au premier problème causé par nulle autre que lui-même et amplifié en plus dans sa tête… un problème qui n’était même pas nécessairement si grave en fait, mais qui est devenu l’excuse pour tout arrêté parce que sa peur du rejet était plus forte que son envie de dépasser ses peurs… et c’est moi qui ai subi les conséquences de ça… c’est sûr qu’il en a aussi, mais elles sont sa faute. C’est lui qui a choisi de ne pas régler ses difficultés pendant 40 ans. C’est lui qui a choisi d’interpréter son anxiété comme un signe qu’il devait fuir au lieu de comprendre que, si c’est vrai qu’il était aussi intéressé par moi qu’il le disait, son anxiété soulignait en fait que c’était une situation importante pour lui… quelque chose qu’il peut choisir de vivre et la peur passera ou quelque chose qu’il peut choisir de fuir parce qu’il n’a pas envie d’évoluer. Il a choisi la fuite.
Pour ce qui est de ma supposée terrible colère, je n’ai rien à me reprocher et elle n’était pas exprimée de façon malsaine ou horrible. Pas du tout. La colère est une émotion fondamentale, capitale et essentielle dans le cerveau humain. Personne n’a à avoir honte de vivre et d’exprimer de la colère de temps à autres, surtout pas après s’être fait faire quelque chose d’extrêmement blessant. Je suis gentille, oui, mais je ne me souviens pas d’avoir jamais prétendu être une petite nounoune qui se laisse faire quand on lui fait du mal ou qu’on la prend pour une conne. J’ai le droit de me protéger quand on me fait du mal. Si quelqu’un a décidé que j’étais une personne qui se laisse faire dans sa tête, c’est de la condescendance et c’est de sa faute, pas la mienne. Si une personne pense que la colère c’est mal et inadmissible, elle a tort. J’écrirai tout un billet là-dessus bientôt.
J’ai vécu une période extrêmement éprouvante et terrible. Ça a été un début d’année particulièrement traumatisant en plus de la pandémie. Par contre, j’ai bien réagi. Je n’ai pas écouté les personnes qui me disaient de ne pas penser à ça, de me divertir et… Je ne les ai pas écoutées parce que c’est vraiment malsain de faire ça… de refouler ou de fuir. Faire ça, ça garantit de se nuire et aussi de nuire aux autres dans notre vie. J’ai choisi à la place d’affronter ce qui m’arrivait. Résultat : Ça m’a pris un mois et 2/3 pour sortir d’un état de stress post-traumatique grave et j’ai acquis une quantité incroyable d’informations sur moi et sur les traumatismes au fil des démarches. J’ai aussi plus appris à prendre soin de moi et des autres. Mon mécanisme de défense, c’est de m’informer. C’est le meilleur que j’ai trouvé après avoir eu affaire aux peurs, aux manipulations, aux violences et à la désinformation des autres. Résultat : Suite à ces expériences, je m’aime plus, j’ai plus confiance en moi et je me sens mieux dans ma peau que jamais. Les personnes qui m’ont fait du mal et évitent sont encore au même point.
Je vais globalement mieux. Je sais sur quoi travailler pour la suite. J’écrirai des billets sur différentes choses que je confronte au fur et à mesure. Je me sens disponible pour reprendre réellement ma vie et mes projets de création. J’ai reçu un diagnostic que deuils multiples et de burnout émotionnel à cause de tout ce qui s’est produit et de tout ce qui m’a été fait ces derniers mois. Je peux continuer à travailler, mais je dois vraiment prendre soin de moi et ralentir dans l’ensemble de ma vie. Être aussi très prudente dans mes relations.
Je vais mieux, mais j’ai mal encore souvent. J’ai mal surtout par rapport à la relation amoureuse. Je me suis sentie très humiliée. J’ai vraiment été blessée. Je suis triste parce que j’aurais pu l’aimer, parce que je suis déçue, parce que c’était une personne qui avait beaucoup de qualités que je recherche chez l’autre. Je dois cependant me concentrer sur ce qui a réellement été fait. Sur le fait qu’il a choisi de décider à ma place de ce que je ressentais, de ce que je voulais et … et de fuir au lieu de chercher à dépasser les difficultés. À la fin ça parle de sa peur à lui et de son attitude face à la vie. Pas tellement de moi.
J’ai moins mal par rapport aux deux relations avec les femmes. Pas parce que je les valorisais moins, mais parce que dans les deux cas c’est n’importe quoi et c’est injuste. Je suis certaine à 100% de n’avoir absolument rien fait pour mériter d’être traitée comme ça par ni l’une ni l’autre. Ce sont deux personnes avec qui j’ai toujours été gentille et généreuse. Leur violence leur appartient.
Je sais aussi maintenant que je dois travailler sur mon style d’attachement anxieux. Je dois prendre le temps de vivre ces vieilles émotions enfouies en moi même si elles m’effraient afin de m’en libérer. J’écrirai bientôt sur les ressources que j’ai trouvées. Je sais que je dois aussi moins accorder de qualités aux autres trop vite. J’ai tendance à faire cela malheureusement… et à accorder plus de valeur à l’autre qu’à moi. Je suis souvent déçue lorsque les vrais visages se montrent. J’ai aussi appris et bien intégré que dans la vie, j’ai besoin, amicalement et amoureusement, de personnes sécurisantes sur qui je peux vraiment compter. Des personnes qui font ce qu’elles disent et qui veulent réellement me connaître et être là pour moi. Je sais que je saurai faire preuve des mêmes choses en retour pour ces personnes. J’ai aussi besoin de personnes qui comprennent que l’amour est un choix. L’amour réel découle du fait de choisir quelqu’un et de choisir de faire les efforts pour être avec cette personne. L’autre conception de l’amour, celle qui veut que ce soit quelque chose d’incompréhensible et d’incontrôlable est fausse. Ce n’est pas de l’amour. C’est une personne qui appuie sur tes bobos… Il faut démêler les deux et grandir.
J’ai travaillé vraiment fort.
Le film d’horreur est terminé.
Bonne journée et à bientôt!
