Le stress post-traumatique (les symptômes – suite)

      En plus des symptômes d’évitement et de ressassement que j’ai décrits la dernière fois, il y a d’autres effets secondaires qui proviennent du type de violence que j’ai vécu et qui sont liés à l’état de stress post-traumatique.

Des altérations cognitives et émotionnelles:

  • Incapacité à se rappeler un aspect important de l’événement traumatique
  • Croyances négatives persistantes et exagérées au sujet de soi, des autres ou du monde
  • Tendance à se blâmer
  • Émotions négatives persistantes (peur, horreur, colère, culpabilité, honte)
  • Diminution de l’intérêt pour les activités
  • Sentiment de détachement d’autrui
  • Restrictions des émotions positives

(http://www.iusmm.ca/hopital/usagers-/-famille/info-sur-la-sante-mentale/etat-de-stress-post-traumatique.html)

            Je  ne peux pas vraiment dire que j’avais des problèmes de mémoire. J’ai toujours eu une excellente mémoire. Par contre la personne que je voyais, tout comme mon père et d’autres personnes avant l’avaient fait, essayait de me faire croire que j’avais oublié des choses importantes ou que j’avais halluciné des choses qu’il avait dites ou faites. Ensuite, je n’avais déjà pas une bonne image de moi avant cet incident, mais ça a été pire après. Je pensais que j’étais la pire personne au monde, que j’étais affreuse et insupportable. Ça n’avait rien de rationnel, donc ça ne sert à rien de me dire que c’est ridicule ou faux… Je pensais que tout le monde me détestait. J’avais peur des autres. J’avais peur de leur parler de ce que je vivais parce qu’ils et elles me disaient souvent des imbécilités (vraiment, oui). J’en parlerai dans un autre billet, mais dans ces situations de violence conjugale, l’entourage va en général juste empirer la situation et traumatiser à nouveau la personne qui a été violentée à moins de s’être vraiment profondément informé sur le sujet. Même si en thérapie on parlait souvent du fait que ce qui s’était passé n’était pas de ma faute, je me sentais coupable jusque dans chacune des cellules de mon corps. J’avais l’impression que mon corps produisait une forme de substance malsaine qui suintait par ma peau et forçait les gens à me maltraiter inévitablement. Je pensais aussi que je devais faire quelque chose dont j’étais inconsciente, mais qui attirait inévitablement le mépris et la maltraitance. Durant les semaines et les mois qui ont suivi, je ne vivais que des émotions négatives. Il n’y avait plus rien qui me faisait plaisir ou qui me faisait rire. J’étais dans le fond d’un trou noir où je passais mon temps à pleurer.

            Dans la description, c’est écrit : peur, horreur, colère, culpabilité, honte. C’était exactement ça et je sautais d’une à l’autre à longueur de journées et de nuits sans arrêt. Ce n’était pas comme une rupture régulière où on est triste et en colère, mais où la vie fait encore du sens. Là, tout était tellement soudain et absurde et extrême que mon esprit n’arrivait pas à suivre. Quelque chose s’était brisé en moi… et pas juste mon cœur, excusez le jeu de mots. Mes possibilités de faire sens de l’humanité ou de mon expérience du monde étaient brisées. C’est toute ma façon d’être en relation avec les autres et l’univers qui avaient été fracassée, mise en pièces.

            J’étais aussi devenue incapable de me concentrer sur quoi que ce soit. Plus rien ne m’intéressait. Je ne sortais plus. J’avais arrêté de faire du sport. Je n’écrivais plus. Je ne lisais plus. Comme je l’ai dit tantôt, tout ce que je pouvais faire, c’était regarder des films ou des séries. Il y a juste la télé qui avait assez de pouvoir pour m’englober totalement l’esprit, mon corps épuisé par l’absence de sommeil reposant sur le sofa pendant ce temps.

            Les autres aussi, se sont mis à m’intéresser de moins en moins. Je me suis éloignée de mes amis. Je me suis détachée peu à peu de l’idée d’être en relation, de l’importance que ça avait pour moi. C’est une bonne chose, même si plusieurs trouvent ça bizarre, parce que je pense que ça avait trop d’importance pour moi avant. J’avais trop tendance à définir ma valeur par rapport à si les hommes voulaient de moi ou pas et le fait de ne pas être en relation m’apparaissait comme un échec, alors que ce n’est pas du tout le cas. Je pense que les gens sont obsédés par le couple et qu’ils laissent tomber énormément de parties d’eux-mêmes et de personnes qui les entourent pour atteindre cet idéal qui n’en est pas un, mais qui est plutôt seulement une construction sociale. Je n’ai rien contre le couple non plus. Je ne pense juste plus qu’il est un objectif que l’humain doit nécessairement atteindre, ni qu’une personne en couple est mieux ou a plus de valeur qu’une personne qui ne l’est pas. Avant je pensais ça, oui, et je pense que plusieurs personnes qui sont seules maintenant le pensent aussi… mais c’est faux. On n’est pas obligés non plus… Il n’y a pas de règles ni de lois… Souvent juste des personnes en couple malheureuses qui tentent de se rassurer par rapport au fait que c’est LA chose à faire et qui essaient de vous faire sentir anormal si vous ne faites pas la même chose (c’est pareil pour les enfants)…

            Finalement j’avais de la difficulté à avoir du plaisir dans les activités que je faisais. J’avais encore plus de difficulté à montrer quand j’en avais. Ça, c’est depuis que je suis toute petite. Quand j’étais plus jeune, mon père (et parfois ma mère aussi) riait de moi quand j’aimais quelque chose, ou encore le tournait en ridicule et disait que ça n’avait pas de bon sens. J’ai donc pris l’habitude très jeune de cacher ce que j’aimais et quand j’étais heureuse pour éviter que les autres brisent mon enthousiasme et mon bonheur. Ça fait souvent croire aux gens que je n’aime rien et que je suis toujours déprimée, mais ça aussi c’est faux. Il faut juste être très proche de moi et agir de façon très respectueuse pour que j’accepte de montrer cette partie de moi. Je regrette d’ailleurs encore souvent après l’avoir fait parce qu’il n’y a pas beaucoup de personnes qui ont du respect pour les autres et leurs différences… dans mon expérience en tout cas.

            D’autres symptômes :

L’hyperactivation du système nerveux:

  • Irritabilité ou excès de colère
  • Comportement imprudent ou autodestructeur
  • Hypervigilance
  • Sursauts
  • Difficultés de concentration
  • Difficultés de sommeil

(http://www.iusmm.ca/hopital/usagers-/-famille/info-sur-la-sante-mentale/etat-de-stress-post-traumatique.html)

            J’étais, dans les mois, voire les années qui ont suivi cette histoire, effectivement très souvent en colère, très susceptible et facilement irritable aussi. Je pense par contre encore aujourd’hui que ces colères étaient justifiées à la fois par ce qui m’arrivait et ce que les gens me disaient. Ça n’avait pas de bon sens, l’écart entre ce qui m’arrivait, ce que je vivais, et les conneries que les autres me disaient, souvent en voulant bien faire j’imagine… Malheureusement plusieurs personnes me tenaient pour responsable de cette violence et ça c’est quelque chose de complètement absurde et bizarre que je n’accepterai jamais. Je ne me suis pas « laissée faire » et je n’ai pas « couru après » non plus… Je ne suis pas faible. Je ne suis pas « une victime » au sens fautif où ils l’emploient non plus.

            J’ai commencé à me traiter très mal aussi. Je mangeais trop, je fumais trop et je buvais trop. Le danger, quand on porte une souffrance aussi grande, c’est de la retourner contre soit violemment (ce vers quoi les commentaires ignorants des autres vous pousse encore plus sauvagement d’ailleurs). Par exemple, même si vous n’avez pas de problème avec l’alcool, une fois lancé, après un verre ou deux, quand la trappe de souffrance sur laquelle vous arriviez à vous tenir sagement en l’empêchant de s’ouvrir plus grand s’ouvre finalement, vous êtes alors lancé sur la voie des excès dont vous vous relèverez encore plus souffrant et honteux le lendemain. Je ne bois plus très souvent d’alcool maintenant. J’avais arrêté pendant cette période. Maintenant je le fais très rarement. Les surdoués ne gèrent pas très bien certaines substances non plus. Elles les affectent plus que d’autres à cause de leur très grande sensibilité qui n’est pas qu’émotive. Elle concerne d’autres aspects d’eux-mêmes. Je ne supporte plus le café… que je dois toujours boire au moins à moitié déca… Je ne supporte plus l’alcool non plus. Le sucre commence à me créer des faiblesses assez intenses aussi sans que je sois pour autant diabétique. Je finirai sans vice, j’imagine… C’est ce que je dois me dire.

            L’hypervigilance et les sursauts sont aussi des choses que j’ai vécues. J’avais peur de tout et de tous tout le temps après cette histoire. Je me cachais chez moi la plupart du temps et quand je sortais c’était toujours pour aller dans des endroits non menaçants. Moi qui avais tant aimé aider les autres, je fuyais maintenant en marchant très vite dès que quelqu’un se tournait vers moi ou me demandait quelque chose. J’évitais de répondre au téléphone. J’évitais de sortir aux heures où je jugeais qu’il y avait trop de gens dans les rues. Au moindre bruit je pensais que quelqu’un était dans la maison. Je me réveillais constamment pendant la nuit. Je vivais dans une inquiétude constante qui m’épuisait, m’empêchait de dormir et finalement de vivre…

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