Je vais un peu mieux aujourd’hui. Le moral n’est pas si fort ces jours-ci, mais je m’accroche! Une étudiante qui a un diagnostic de douance est venue me voir au bureau aujourd’hui. Ça m’a fait un peu de bien. C’est intéressant quand on est face à une personne avec le même fonctionnement cérébral… ou en tout cas un plus proche. Bien sûr son évaluation était excellente. Je me sentais un peu comme à la maison. J’en ai deux cette session. J’en ai eu une l’an dernier. Elles sont rares, mais elles me rendent heureuse. Je suis contente que les diagnostics soient faits de plus en plus jeune. Ça leur évitera bien des problèmes même si ça n’annule pas tout. J’étais encore plus heureuse quand elle m’a demandé des suggestions de lectures féministes.
D’un autre côté, je me sentais triste. Un autre homme m’a dit que dans la relation la femme est le boss. Ça m’a donné envie de pleurer. Quelqu’un m’a dit aussi il y a quelques temps qu’il ne voyait pas le problème avec les relations inégalitaires… C’était un prof qui couchait avec des étudiantes et qui m’a enlevée de ses amis facebook après ma publication sur comment à ma fête j’avais vendu les livres des profs et poètes qui voulaient coucher avec moi quand j’avais 19 ans pour m’acheter un gâteau. J’ai trouvé ça passif-agressif… En même temps il n’y avait pas grand-chose à dire…
Je ne risque pas de changer d’idée et de me mettre à penser que c’est ok d’utiliser sa position de pouvoir pour coucher avec des petites filles (parce que c’est ce qu’elles sont, même si elles ont des corps de femmes… mais c’est un peu ça mon point quand je dis que les hommes ne nous voient souvent pas comme des personnes… les voir comme des personnes serait justement être conscient de leur âge, de leur absence d’expérience, de leur incapacité de concevoir à quel point un mauvais choix de relation sexuelle peut impacter leur vie et leur santé mentale et… ce serait ça, les voir comme des personnes et non juste des images ou des figurantes). C’est impossible que je change d’idée puisque pendant sa suspension je m’étais beaucoup informée et aujourd’hui, au Québec, à cause du lien de confiance qu’on encourage l’élève à avoir avec son professeur, les cas de relations sexuelles entre professeurs et élèves sont traités comme des cas d’inceste parce qu’ils ont les mêmes impacts psychologiques… mais comment vous voulez que je fasse comprendre à quelqu’un quelque chose d’aussi délicat et complexe alors qu’il croit qu’il n’y a aucun problème avec les relations inégalitaires? Alors il valait mieux ne pas parler non. Surtout que c’est quelqu’un qui ne remet pas beaucoup en question. Quelqu’un qui est aussi incapable de comprendre qu’à cause de la situation le consentement de ces jeunes femmes n’a pas de valeur… Il est tellement loin de comprendre quoi que ce soit à tout ça… mais oui, admettre qu’on a agressé des personnes ça doit être difficile à admettre. C’est cependant nécessaire pour régler le problème.
De toute façon, j’aurais probablement eu droit à un commentaire sur la difficulté de vieillir et ma jalousie du corps des jeunes femmes et de l’attention masculine qu’elles ont… ça me fait rire quand ils me disent ça… comment si ça devait désamorcer tous mes arguments… mais ça ne fonctionne pas parce que c’est l’inverse dans mon cas… plus je vieillis et plus j’ai d’attention masculine. Je me trouve plus belle aussi, vraiment beaucoup plus belle, que quand j’avais 19 ans.
Cette histoire de femme boss et de relations inégalitaires, ça m’a fait penser à ce qu’il s’est passé l’été dernier. Je pense que c’était une des choses les plus insultantes de la situation, me faire comparer négativement à une personne qui vit ses relations comme ça. Ça me dégoûte. Ça me donne envie de mourir, moi, les relations où une personne a de l’ascendant sur l’autre. Et c’est normal, parce que c’est infiniment malsain. Les relations où on utilise l’autre, où on lui ment et où on ne le voit pas comme une personne aussi. Pourtant elles ont la cote. Les relations basées sur ces choses sont juste vécues avec des personnes qui ont une conception malsaine de l’amour aussi et qui ont peur d’être seules… Les personnes qui ne s’aiment pas aussi. Je ne suis pas près de penser que je suis moins aimable que ces personnes ni que ces relations sont de l’amour.
Mais on vit sans un monde où les gens continue de penser et de répandre l’idée que les hommes ont une libido plus grande que les femmes et que c’est ce qui les pousserait à faire des choses malsaines… on vit dans une société qui croit ça alors que ça fait au moins une décennie que c’est prouvé faux par des études scientifiques… Ça me donne envie de pleurer et de ne jamais arrêter. J’ai des deuils à faire.
